Un programme à grande échelle pour enrichir les pratiques pédagogiques des enseignants

Depuis plusieurs années, Franck Ramus forme des enseignants, des formateurs et des cadres de l'Education Nationale. Désireux de permettre au plus grand nombre d’accéder à cette formation, il décide de rendre ces cours accessibles à tous, gratuitement, sur internet à travers la création d’un MOOC (Massive Open Online Courses). " J'ai vite réalisé que même lors de formations en grand amphi avec plusieurs centaines de personnes, mon impact était très limité, sachant qu'il y a 870 000 enseignants en France. Ayant un temps limité à consacrer à la formation, je ne pouvais pas passer ma vie à faire le tour des académies. Toute tentative d'enrichir significativement la formation des enseignants passait nécessairement par un projet à une toute autre échelle. L'idée d'un Mooc (formation "massive" en ligne) s'est donc imposée comme une évidence. »
 

Une formation basée sur les résultats de la psychologie scientifique  

Ce programme répond à une carence dans la formation des enseignants. « Il est difficile de dire des généralités sur la formation des enseignants tant elle est hétérogène. Mais globalement, on peut dire que les enseignants français sont peu formés à la psychologie, et le peu qu'ils en reçoivent est souvent assez daté, théorique, et de peu d'utilité en classe. Pire, ils sont parfois exposés à des théories pseudo-scientifiques très à la mode telles que les styles d'apprentissage, les intelligences multiples, ou encore les histoires de cerveau droit et cerveau gauche. On les appelle les "neuromythes".
C'est dommage, car la psychologie scientifique a établi de nombreux résultats fiables et importants, qui ont un intérêt direct pour les pratiques pédagogiques des enseignants. Malheureusement ces résultats sont peu connus et quasi-absents des formations. »


Un programme soutenu par l’ENS-PSL et le réseau Canopé

Franck Ramus a élaboré les grandes lignes de ce programme, en se faisant aider d'un comité de relecture très large composé de chercheurs, d'enseignants et de cadres de l'éducation nationale. « Ces collègues m'ont beaucoup aidé à faire le tri entre toutes les idées, à sélectionner les plus importantes et à affiner les contenus. ». Il a ainsi choisi de se focaliser sur trois sujets: la mémoire, le comportement, et la motivation et la métacognition. « Il m'a semblé qu'il s'agissait de sujets très importants pour les enseignants, et sur lesquels ils étaient particulièrement désarmés. J'ai élaboré les contenus des deux premières parties, avec l'aide de Jean-François Parmentier, ingénieur de recherche en pédagogie (https://jfparmentier.fr Toulouse INP-ENSEEIHT) et du comité de relecture. Pour la troisième partie, j'ai fait appel à ma consœur Joëlle Proust (membre de l’Institut Jean Nicod) qui est spécialiste de la métacognition. »  Sur le plan institutionnel, le projet de Mooc a été soumis à l'appel à propositions de l'ENS, qui l'a accepté et financé. « Par la suite, j'ai obtenu l'appui de Réseau Canopé*, qui a apporté son savoir-faire dans la conduite de tels projets et pour la scénarisation et le graphisme. »

* Le réseau Canope est un établissement public à caractère administratif et éditeur de ressources pédagogiques public, dépendant du ministère de l'Éducation nationale. https://www.reseau-canope.fr.

Une formation très attendue

L'annonce a été diffusée sur les réseaux sociaux et à travers divers canaux du ministère de l'éducation nationale. Elle a notamment été publiée dans la lettre d'information envoyée aux enseignants avant les vacances d'automne. « A deux semaines de l'ouverture, nous sommes à 15 000 inscrits. Cela montre que les sujets abordés répondent à un véritable besoin de la part des enseignants. Cela ne m'étonne pas, puisqu'ils ont été choisis précisément pour cela. J'aurais pu me tromper de cible, bien sûr, mais de toute évidence j'ai plutôt visé juste, et je m'en réjouis. J'espère que la formation répondra au moins en partie à leurs attentes ». 

Vers une éducation fondée sur des preuves

Ce programme s'inscrit dans l'approche d'une éducation fondée sur des preuves. Depuis une quinzaine d’années, Franck Ramus multiplie les conférences et les articles pour expliquer l’importance de l’évaluation scientifique des méthodes et des pratiques éducatives. Enseigner est une pratique (comme la médecine et la psychologie clinique) qui doit être fondée sur des connaissances scientifiques sur son objet (les apprentissages) et sur une évaluation scientifique de ses pratiques. A la question nous dirigeons-nous vers une éducation fondée sur des preuves ? Le chercheur apporte une réponse optimiste. « Les choses évoluent dans le bon sens, c’est certain, même si on peut considérer que c’est toujours trop lent et inachevé. La création du CSEN a été un signal fort dans cette direction, qui n’a pas encore livré toutes ses promesses. Dans ce domaine, il faut être patient et viser le très long-terme ! »