Soutenance de thèse

The Way We Learn

Intervenant(s)
Monica Barbir (LSCP)
Informations pratiques
04 octobre 2019
14h
Lieu

ENS, 24 rue Lhomond, 75005, Paris - salle E012 - Salle des Éléments
 

LSCP

Jury : 
Anne CHRISTOPHE Directeur de recherche Ecole normale supérieure  Directeur de thèse
Chen YU Full professor Indiana University Bloomington Rapporteur
Nuria SEBASTIAN-GALLES Full professor Universitat Pompeu Fabra Rapporteur
Judit GERVAIN Directeur de recherche Université Paris Descartes Examinateur
Luigi RIZZI Full professor Universita di Siena Examinateur
Isabelle DAUTRICHE Chargé de recherche Université Aix-Marseille Examinateur

Apprendre, c’est extraire et condenser de l’information pertinente à partir d’un certain nombre d’indices concordants. Pourtant, les indices auxquels un apprenant a, ou pourrait avoir, accès, peuvent sembler insuffisants pour ce à quoi il veut parvenir. Le caractère partiel ou insuffisant des indices disponibles est souvent évoqué dans le contexte de l’acquisition du langage : le sens des mots et la grammaire que les individus maîtrisent semblent nécessiter davantage d’information que celle présente dans leur environnement. Si une grande partie de la recherche se focalise sur l’identification de sources d’information négligées ou sous-estimées jusqu’alors, ici nous déplaçons le point de vue pour explorer plutôt les connaissances que ces sources d’information doivent permettre de construire. Nous proposons dans ce travail que les informations disponibles restent souvent insuffisantes pour atteindre le niveau de connaissance qu'un locuteur compétent pense avoir; toutefois, la même information peut être suffisante pour qu’un apprenant extraie l’information nécessaire au traitement cognitif du langage. Plus généralement, il pourrait y avoir un décalage entre ce que l’on pense apprendre et ce que l’on apprend véritablement. 
Dans l’introduction de ce travail, nous commençons par une présentation des études qui suggèrent l’existence d’un décalage entre notre intuition de ce qu’est le sens des mots, et la manière dont le sens des mots est effectivement traité par le cerveau. Nous explorons ce décalage dans le contexte plus général de la manière dont les individus, qui ne disposent que d’informations limitées, tentent de comprendre le monde. Ensuite, dans le premier chapitre, nous examinons comment une faible quantité d’information peut malgré tout favoriser l’acquisition de la grammaire, en utilisant un paradigme écologique. Nos résultats démontrent que la connaissance d’une petite poignée de mots peut générer un cercle vertueux dans l’acquisition de la grammaire et du vocabulaire chez le bébé. Puis, dans le deuxième chapitre, nous tâchons de découvrir si cet ensemble réduit d’informations peut suffire à amorcer l’acquisition d’un savoir productif qui permettra ensuite de généraliser cette connaissance à des situations nouvelles, à travers les âges : du bébé à l’adulte en passant par l’enfant d'âge scolaire. Nos données suggèrent que les bébés et les adultes généralisent les caractéristiques d’un nouvel élément grammatical afin de comprendre de nouveaux mots, mais que les enfants d’âge scolaire ne généralisent pas. Nous expliquons nos résultats dans le contexte de la recherche existante sur la généralisation, en soulignant la possibilité que ce qui est considéré comme savoir est peut-être défini par rapport à un seuil, plutôt que par rapport à une définition idéale objective. Finalement, dans le troisième chapitre, nous étudions si l’information qui donne l’impression de refléter directement l’état des connaissances de quelqu’un d’autre (i.e., entendre une traduction directe : ‘Bamoule’, ça veut dire ‘chat’) est véritablement plus utile, ou seulement plus attractive. Nos résultats suggèrent que ce type d’information ‘clé-en-main’ augmente systématiquement la confiance de l’apprenant, mais a des effets variables sur la performance objective. A travers trois chapitres et dix expériences, nous proposons une série de principes qui définissent la connaissance : (1) une petite quantité d’information peut mener loin, (2) combien d’information suffit semble dépendre d'un seuil adaptable, et (3) le cerveau paraît être avide de certitude. Nous suggérerons que l’ensemble des informations à la disposition d’un individu peut être suffisant pour générer des connaissances, mais pas forcément le type de connaissances que l’on a l’intuition d’avoir. Ainsi, pour mieux comprendre comment on apprend, nous devons étudier ce que signifie vraiment ‘savoir’ pour l'apprenant.